Arrivé, enfin!
13:40 à Paris
22:40 à Nouméa, un samedi soir sur la terre.
Il
s'est en effet passé quelque chose, une petite série, une série
d'événements mineurs qui ne suffiront pas malheureusement à satisfaire
la joyeuse espérance de monsieur Anonyme:
je
suis toujours vivant et les douces effluves d'un paradis niché au creux
du Pacifique emplissent avec merveille et délices mes poumons à la
sortie de l'aéroport de Tontouta.
Allez, raconte!
D'abord, Nantes:
07:05 - le TGV ne part pas.
07:35 - il s'ébranle enfin.
Une
demi-heure de retard sur un voyage d'une trentaine d'heures, c'est
quoi? Juste un petit grain de sable qui peut faire capoter l'ensemble:
une première correspondance ratée à Massy et c'est l'avion qui s'envole
de Roissy sans vous! Correspondance prévue à Massy 25 minutes.
Que va faire la SNCF pour combler le retard dû à un problème d'aiguillage à Angers?
Plusieurs
hypothèses que je balaye rapidement de mon esprit pour l'épargner de
tout stress inutile vu qu'on n'a pas la main mais juste le sourire de la
contrôleuse qui passe consciencieusement dans la rangée centrale pour
recenser la clientèle en transit vers Roissy.
Un
message de délivrance lancé les hauts-parleurs ferroviaires entre Le
Mans et Massy finit par rassurer cette clientèle-otage: le train de
Bordeaux sera retenu un instant pour nous laisser passer sur l'unique
voie de la gare de Massy! Correspondance assurée!
Le
dernier tronçon se fait dans un TGV aux couloirs bondés de valises
aéroportuaires, j'y glisse la mienne qui soudain me semble de plus en
plus lourde à l'approche de Roissy.
11:15 - Roissy
Je suis encore dans les temps malgré la demi-heure perdue.
Direction
le terminal 2E d'enregistrement. Les roulettes de la valise ne roulent
pas, j'ai comme l'impression de trainer un corps mort. Je prends un
chariot.
11:45 - le corps mort fait 36kg!
L'employée Air France typée indienne me dit:
- N'y pense même pas! Avec ce poids, on ne prend pas, au-dessus de 32kg c'est du fret.
- Euh! ...
- Ensuite c'est 40€ le kilo!
J'ai
soudain chaud, il est 11h50, j'imagine comment faire disparaitre les
4kg, des Coréens derrière moi font le pressing, j'ai du mal à multiplier
une fois la soustraction faite, 12 fois 40 ....
- Suivant!
- 480€ !
11:58
Opération
amaigrissement dans un coin reculé du terminal. Tel une boulimique
honteuse j'enfourne mes deux bras dans la valise éventrée aux regards de
tous pour la faire vomir de ces quatre kilos excédentaires.
Pas
les slips, trop légers, surtout les strings. Viser les tee-shirts
coton, c'est lourd le coton, les pantalons aussi. Adieu le masque
capillaire, je ne dois pas le valoir aussi bien, tant pis. J'empile mes
frusques, on dirait un vide-grenier, une vente à la sauvette. J'enfile
un tee-shirt, puis deux, puis trois, quatre, le cinquième me servira de
serviette éponge autour du coup comme un boxeur entre deux rounds.
Personne ne veut de mon masque capillaire même gratuit. Je finis ma pile
en déposant le guide du routard "Nouvelle Calédonie" au sommet.
Comment
savoir que l'excédent a été retiré. Il fait chaud, très chaud, le
chrono tourne, le décollage est toujours prévu à 13:30. Bientôt midi et
dire qu'il me reste à passer tous les contrôles dans un aéroport classé
parmi les pires du monde. Ma valise prise en flagrant délit d'obésité
toujours pas enregistrée, des Coréens qui se sont multipliés par 40, au
moins, ils sont partout, de grosses gouttes de sueur viennent s'écraser
sur ma valise que je referme.
De
rage je la tire sous les cordons qui délimitent les files d'attente.
Mes gouttes de sueur et ma détermination doivent se lire sur mon visage
car personne, surtout pas un Coréen, n'ose contester mon impolitesse, ni
le Herr Kaporal derrière son comptoir Air France.
.
12:10 - 29,3kg
Sa voisine, l'indienne à moustache malgré un physique encore jeune, suit avec une attention sadique la prise en charge de ma valise par Helmut.
- 100€!
- Das ist unmöglich, Uberstumfurher!
- 480€! Salaud de vieux beau! Tu vas payer! s'exclame l'ersatz boollywoodien dans un français très épuré.
- Ta gueule salope! s'entend-elle dire sur le même ton châtié.
- Oui, monsieur, cela ne vous coutera que 100€, c'est un forfait.
S'en suit une discussion agitée entre mon sauveur aryen et l'exilée de Calcutta dans l'interprétation de la note de service à propos de la facturation des vieux-beaux à grosses valises et à Gold posée sur le comptoir.
Munich: 1 - Bombay: 0
- Danke Schön!12:15
La valise posée sur le tapis en caoutchouc noir s'éloigne doucement vers Nouméa et me laisse seul avec ma Gold repoussée délicatement par mon légionnaire. Quittant son poste, il propose de m'accompagner vers un terminal spécifique de paiement en panne, puis un autre en panne, puis enfin, il m'escorte jusqu'au bureau de vente Air France. Ma sueur doit sentir le sable chaud et viril.
12:20
Juste trois personnes devant moi dans la queue du bureau de vente, toujours pour payer mes 100€ et pouvoir acquérir mon sésame d'embarquement. La première attente sera courte. Un autre légionnaire d'Air France, brun cette fois-ci, m'invite à son comptoir. La transaction d'habitude rapide sera longue. Dix minutes au téléphone! La faute à un bug informatique. Encore cinq minutes pour aller chercher les justificatifs et le sésame dans un bureau construit en bout de piste! Ma valise doit être déjà dans l'avion, elle!
Mon sac à dos cabine chargé à craquer de High tech (tablette, PC portable, deux reflex, MP4 Samsung, disques durs, mobile) et pesant au moins quinze kilos m'ankylose l'épaule malgré les couches de l'oignon 100% coton (merci Lionel).
Il est 12:35 quand je file vers les filtres de sûreté.
Encore ces Coréens! Une file interminable.
Une rose des sables vient m'extirper du supplice asiatique en m'invitant à passer les sas rapides PARAFE, la petite soeur du légionnaire sans doute.
12:45 l'épreuve de la mise à nu du sac-à-dos.
à suivre ...
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